« Pourquoi des noirs mauritaniens s’offusquent quand ils sont traités de sénégalais? Leurs ancêtres étaient de part et d’autre du fleuve bien avant la création coloniale du Sénégal et de la Mauritanie. Maayo wonaa keerol ! (le fleuve n’est pas une frontière!) »
Siree KAN
Je ne comprendrais jamais l’humour-haine de certains sénégalais envers les naar Ganar qu’ils assimilent à de sales sauvages. Et ceux que je comprends le moins encorr ce sont certains noirs mauritaniens qui s’en mêlent pour haïr les sénégalais. Ils oublient que quand l’Etat raciste de Mauritanie les avait déportés, c’est le peuple sénégalais qui les a accueilli, hébergé et nourri.
Il faudrait que cette haine latente et injustifiée de part et d’autre du fleuve cesse et ne prenne plus prétexte la coupe d’Afrique de football pour polluer nos écrans et nos esprits vierges de tout rejet de l’autre. Gardons en mémoire la douloureuse fermeture pendant 5 ans des frontières entre les deux pays.
Pas de mal à traiter les mauritaniens de gros buveurs de thé, puisque le thé, que nous avons la honte de consommer avec excès sans pouvoir le produire, est autant bu à Nouakchott qu’à Dakar. Le racisme et la xénophobie entre peuples majoritairement noirs est vraiment ridicule.
Autre chose, certains sénégalais par leur humour très maladroit imitant l’accent maure, pointent dans une Mauritanie exclusivement arabe, niant de fait l’existence de leurs parents noirs mauritaniens quu se battent pour la reconnaissance de leur identité. Ils ne sont pas arabes. Lhumoriste Koutia dépeint toute la Mauritanie avec une daraa et un hassaniya approximatif, un cliché bien implanté dans les grandes zones urbaines du Sénégal. C’est marrant mais la réalité de la société mauritanienne est faussée.
À quand l’humour conscient et qui éveille les nations africaines pour qu’elles fraternisent et s’éloignent de préjugés destructeurs? Ce sont davantage les chanteurs qui travaillent à cela. Prime spéciale à Baaba Maal, Malouma mint Meidah, Ismaïla Lo, Djoba Gueye,…
Sénégalais, la plupart d’entre vous viennent de Mauritanie, notamment les peuls du pays de la Teranga et les wolofs du waalo. Si vous réduisez la Mauritanie à ataaya, melfa et daraa, vous oubliez que le sari et le thé sont plus hindous qu’arabes. Le boubou à poche ventrale triangulaire est du Tekruur wolof, peul, sérère et soninké. Les arabes beni hassan ne sont venus ici qu’en 1356, s’ajoutant aux noirs et berbères. Nous nous sommes tous mélangés et métissés et qui se moque de l’un se moque de lui-même. Tant que ça reste bon enfant, ça va. Mais il y a souvent des dérapages. On doit contribuer à l’unité des peuples africains pour asseoir une paix durable entre les nations.
Pourquoi des noirs mauritaniens s’offusquent quand ils sont traités de sénégalais? Leurs ancêtres étaient de part et d’autre du fleuve bien avant la création coloniale du Sénégal et de la Mauritanie. Maayo wonaa keerol !
(le fleuve n’est pas une frontière!)
1er février 2024
Siree KAN (Sammba NDEET)
Naar Ganaar: les arabes de Mauritanie, berbères aussi
Daraa: boubou herité de l’art vestimentaire tekruur
Photo: CAN 2023. Le mourabitoune Aboubakary Koïta, sofa du Tekruur, assailli par 4 fennecs. La Mauritanie avait éliminé l’Algérie, se qualifiant pour les 8èmes de finale pour la 1ère fois de son histoire.