Je ne comprendrais jamais pourquoi les leaders politiques du Tékrour s’agglutinent presque tous à Nouakchott, laissant leurs régions à la merci du parti-Etat et ses satellites. Serait-ce l’échec de la décentralisation qu’ils réclament eux-mêmes?
Quasiment aucun parti n’a son siège central en dehors de Nouakchott, c’est dire que la centralisation à la soviétique a été adoptée par tous nos politiques jusque dans leur fonctionnement. La fibre régionale, qui permet plus de proximité avec les terroirs, est quasi inexistante.
Nouakchott qui, selon les experts, va bientôt sombrer sous les eaux de l’océan et des nappes phréatiques, est la seule ville attractive pour les ambitions politiques ?
Nouakchott dont le récent découpage en régions les défavorise. Sebkha, El Mina et Ryadh qui votaient traditionnellement pour des candidats noirs, ont été diluées dans des zones favorables aux militaires.
Vu cette hyper concentration des leaders du Sud dans la capitale, leur électorat sera automatiquement dispersé au profit du pouvoir. Pas besoin de faire sciences politiques pour comprendre cela. En délaissant Selibaby, Boghé, Maghama, Kaédi, Rosso, Kiffa,…ce sont les populations du Sud qu’ils livrent clé en main à la junte.
Il est important de comprendre que les véritables élections importantes pour des partis qui prônent l’autonomie ce sont les élections régionales et travailler par conséquent pour leur transparence et la redéfinition des pouvoirs attribués à une région. Cette hauteur de vue est nécessaire pour asseoir un Sud de moins en moins dépendant de Nouakchott.
MAÏS avait appelé dès septembre à ne voter que pour les candidats dont les partis ou mouvements reconnaissent le génocide perpétré contre les noirs. Et on a invité les tékrouriens à s’inscrire massivement au Sud. Ce n’est qu’une petite répétition de ce qu’il faudra appliquer strictement dans..5 ans!
Sans surprise, avec une ceni aux ordres, ces élections ne reconfigureront pas le paysage politique. Et parler à l’assemblée nationale n’y changera rien, tous les projets de loi seront votés.
Même dans les plus vieilles démocraties du monde comme la France, le président peut ignorer le vote des parlementaires en engageant simplement la responsabilité de son gouvernement. Une sorte de dictature autorisée par la constitution. Aux USA, un président battu a refusé de reconnaître sa défaite. Et, récemment, un putsch a été déjoué en Allemagne. Ce sont là des signes de l’effondrement du modèle démocratique occidental que les africains copient en récoltant un peu plus d’instabilité après chaque élection.
En Mauritanie, la politique et les élections n’ont comme résultat visible que la division des tékrouriens. Du côté du parti-Etat et ses satellites, c’est la discipline militaire imposée par la junte. La seule politique qui vaille serait celle qui mène à l’administration réelle de nos regions, qui seraient dotées de pouvoirs solutionnant les injustices les plus criantes (terres, education, etat civil,…)
Les régions du Tékrour joueraient ainsi leur rôle de contre-pouvoir face à Nouakchott, capitale d’un Etat raciste, diviseur, génocidaire, voleur et corrompu. C’est cela la vraie décentralisation.
19 mars 2023
Siree KAN
Fondateur de MAÏS
Mouvement des Autochtones pour l’Indépendance du Sud mauritanien (TÉKROUR)