Après une semaine de contestation durement réprimée à N’Djamena, le Conseil militaire de transition (CMT) du Tchad a nommé, dimanche soir, un nouveau gouvernement, composé presque exclusivement de civils et de quelques membres de l’opposition.
Ce premier pas vers la normalisation du pouvoir, s’il a été salué par la communauté internationale, n’a pas apaisé les inquiétudes des jeunes et de la société civile. Pour le chef de la mission d’enquête de l’Union africaine sur la « situation politique et sécuritaire » au Tchad, c’est « aux Tchadiens et aux Tchadiennes de sortir leur pays des difficultés ». Faut-il souligner qu’aucune institution panafricaine n’a pris de mesures de sanctions contre le pays.
Une mission sur le terrain
Concrètement, l’Union africaine (UA) a envoyé une mission jeudi au Tchad pour déterminer si l’organisation prendrait des sanctions contre le pays d’Afrique centrale en raison de son évolution politique depuis la mort il y a deux semaines de son président, Idriss Déby Itno. Un Conseil militaire de transition (CMT) a été mis en place en place avec à sa tête Mahamat Idriss Déby, fils du défunt président, qui concentre presque tous les pouvoirs. Le nouvel homme fort du pays, entouré de 14 généraux, tous fidèles à son père, a dissous l’Assemblée et le gouvernement, et a promis des élections sous dix-huit mois.
Cette prise de pouvoir du CMT, contraire aux règles de l’Union africaine, a « divisé » le Conseil de paix et de sécurité de l’UA : « Certains pensant qu’il fallait tout de suite appliquer les protocoles (et sanctionner le Tchad), d’autres disant qu’il fallait donner un peu plus de temps, car la situation ne concerne pas seulement le Tchad », a déclaré à l’AFP, lundi, l’ambassadeur de Djibouti en Éthiopie, président du Conseil de paix et de sécurité de l’UA, Mohamed Idriss Farah, faisant référence notamment au rôle joué par le pays dans la lutte contre le djihadisme dans le Sahel.
Durant la mission d’enquête, « nous avons discuté de beaucoup de sujets, et notamment de comment accompagner durant cette période difficile le Tchad », a ajouté le diplomate. « Mais c’est d’abord aux Tchadiens et aux Tchadiennes de sortir leur pays des difficultés, les partenaires seront là pour aider, mais il reviendra à eux de s’entendre politiquement », a-t-il avancé.
Favoriser le dialogue avec les forces politiques
À l’autonome dernier, l’Union africaine n’avait pas tardé à sanctionner le Mali, au lendemain du coup d’État qui a renversé le régime du président Ibrahim Boubacar Keïta par la junte militaire, et ce, malgré des promesses de retour rapide du pouvoir aux civils. Force est de constater que, pour le Tchad, le ton est différent. Partenaire et allié historique, la France « salue », lundi, la formation par la junte d’un « gouvernement de transition dirigé par un Premier ministre civil » et « incluant plusieurs membres de l’opposition ».
Paris rappelle, dans la foulée, « son attachement à la stabilité et à l’intégrité territoriale du pays », dans un communiqué de la porte-parole du ministère français des Affaires étrangères. La France réitère également « l’importance que la transition soit d’une durée limitée et se déroule dans des conditions pacifiques » pour « permettre le retour rapide à des institutions démocratiquement élues », insiste-t-elle, en exprimant son « soutien aux initiatives de l’Union africaine visant à accompagner le Tchad à cette fin ».
Finalement, le Conseil de l’Union africaine a procédé autrement et décidé l’envoi d’une mission pour « récolter le plus d’informations de terrain » afin qu’il puisse ensuite « prendre une décision ». La mission doit quitter N’Djamena mercredi pour remettre dans la foulée son rapport au Conseil de paix et de sécurité de l’UA, composé de quinze pays membres, qui se prononcera ensuite sur d’éventuelles sanctions contre le Tchad.
Le Point Afrique