On peut dire maintenant que le procès dit « de la Décennie » se déroule comme tout procès. Une salle d’audience, un président, des assesseurs, un ministère public, des accusés, des témoins, des avocats pour les deux parties (civile et défense) et un public.
Tous les « ingrédients » de la tenue d’un tribunal sont réunis pour un procès pas comme les autres. Un procès qui appelle à la barre des accusés un ancien chef d’Etat mauritanien pas comme les autres. Un Chef d’Etat qui s’était auto-forgé avec la complicité de ces hommes politiques (toujours les mêmes), puissants, imperturbables, sans attache réelle et sans amis véritables, des hommes politiques capables de faire et de défaire les chefs d’Etats même les plus puissants rien que pour leurs propres intérêts.
Un tribunal qui juge un chef d’Etat pas comme les autres, puisqu’il est arrivé au pouvoir par effraction politique et morale soutenu par des officiers supérieurs qui ont été pour certains d’entre eux corrompus par des élévations à des grades de généraux pour calmer un jeu qui aurait pu dégénérer en conflit armés entres des corps constitués.
Par la tenue de ce procès, commencé avec une enquête parlementaire de complaisance qui s’est faufilée entre des coupables réels et supposés comme une anguille, une enquête rallongée par des investigations d’une police judiciaire qui avait travaillé beaucoup plus sur des arrangements à l’amiable et des coopérations avec certains accusés que sur des enquêtes de fonds, les « hommes du président », de tous les présidents qui se sont succédés et même de celui qu’on juge actuellement sont arrivés à leur fin : La « bête noire », Ould Abdel Aziz a été jetée dans la cage.
Défilé « d’intouchables » pour des témoignages qui les accablent.
Maintenant, Il est évident pour beaucoup que Ould Abdel Aziz n’est pas un président comme les autres présidents qui l’ont précédés. Le premier président, père de la Nation, Moctar Ould Daddah est mort en France ne laissant à ses enfants qu’une maison en ruine construite sur ses fonds propres et des prêts bancaires.
Moustapha Ould Mohamed Saleck est mort laissant derrière lui une veuve, El Yakheir sage femme de fonction, qui vit de sa pension de retraitée. Ould Ahmed Louly est mort laissant derrière lui un tapis de prière qui lui tenait de compagnon inséparable aux moments de ses méditations spirituelles à la grande mosquée de la capitale.
Maaouiya Ould Sid’Ahmed Taya, vit en exil. S’il décidait de rentrer au pays, il irait chercher où dormir. Il a quitté le pouvoir pauvre et pauvre il est resté. Mohamed Khouna Ould Haidalla et Sidi Ould Cheikh Abdallahi, sont entrés dans le palais les mains vides et ils en sont sortis peut être même endettés.
Mohamed Ould Abdel Aziz lui c’est une histoire de faits divers. Il a quitté le pouvoir immensément riche et il est aujourd’hui empêtré dans des difficultés énormes qui le mettent en conflit avec la loi. Des difficultés qui le fragilisent face à des sanctions judiciaires mais aussi et surtout des difficultés qui le « dénudent » complètement.
Pourtant, malgré tout ce qui s’était passé avant pour traquer « le fauve », et, ce qui se passe encore en ce moment pour justifier des raisons de le condamner, le procès, par un défilé de témoins trillés (mais pas à la volée), est entrain de donner raison à l’ancien président qui s’est toujours dit victime d’un procès qui ne cible que sa propre personne.
Si on regarde de plus près les témoignages de certaines personnes appelées à la barre, on se rend compte de toute évidence que même si son ombre plane sur certaines affaires pour lesquelles il est poursuivi, Ould Abdel Aziz, n’est pas -en tous cas au vu de la loi-, responsable de certaines choses qui s’étaient passées et pour lesquelles on lui demande maintenant des comptes.
Quand par exemple, Hassena Ould Ely, donne son accord pour des avantages injustifiés ou indus à accorder à un fonctionnaire de la SNIM, (parce ce fonctionnaire est ce qu’il est), on ne peut pas tenir Ould Abdel Aziz responsable des conséquences d’une décision prise par l’ADG de la SNIM, décision qu’il a prise pour s’éviter un coup de pied dans …. la fonction !
Si en 2013 ce même Hassena Ould Ely avait consciemment accepté de jouer au figurant pour faire fonction du président du conseil d’administration de la fictive société mauritanienne pour le développement et la coopération, (une arnaque dans sa forme la plus classique), ce n’est quand même pas de la faute de Ould Abdel Aziz, même si c’était bien Ould Abdel Aziz le mécanisme de cette affaire frauduleuse.
Si par ailleurs dans l’affaire de l’amputation d’une partie de l’Ecole Nationale de Police, le Général Ahmed Ould Bécrine avait accepté de jouer au rôle « du topographe de Dar-Naime » pour borner l’espace à libérer, ce n’est pas Ould Abdel Aziz qui a commis l’acte que le tribunal veut réprimer. C’est bien le général qui a donné des ordres qui ne relèvent ni de ses prérogatives ni de ses compétences qui doit rendre des comptes.
Si d’autre part un témoin comme l’Homme d’Affaires Ould Daddah dit que Mohcen Ould El Hadj l’avait mis en garde de ne plus se fourrer le nez dans cette affaire de la ligne de Haute Tension que t les indiens négociaienavec la SOMELEC par l’intermédiaire des proches de Ould Abdel Aziz, ce qui a été dit par Mohcen, s’il l’a dit, n’engage que Mohcen Ould Hadj mais n’engage pas Ould Abdel Aziz même à supposer que celui-ci avait demandé à son ancien ami de faire peur à l’homme d’Affaire ce qui reste à prouver.
Par ailleurs si l’Homme d’affaire Mouhyi Eddine O. Ahmed Saleck (dit Sahraoui) déclare que la construction du nouvel aéroport international de Nouakchott lui avait coûté l’énorme somme de 400 Millions de dollars (ce qui reste à prouver) et s’il affirme qu’il avait enregistré d’importantes pertes à cause de la concurrence de l’état au moment où avait commencé la vente des terrains de l’ancien aéroport, ce témoin prend les mauritaniens pour des imbéciles.
Il prend les mauritaniens pour des imbéciles parce qu’il joue simplement à la diversion. La question que se posent les mauritaniens et à laquelle il devrait répondre ce n’est pas de savoir s’il avait gagné ou perdu dans la vente des lots de terrains de l’immense ancien aéroport international de Nouakchott.
Qu’il gagne ou qu’il perde, les mauritaniens s’en foutent. La question à laquelle les mauritaniens voulaient avoir une réponse c’est celle de savoir pourquoi Mouhyi Eddine O. Ahmed Saleck et Mohamed Ould Abdel Aziz avaient joués en complices aux commerçants des marchés hebdomadaires de Kervi de Fassala Néré ou de Modbouguou, en troquant la construction d’un aéroport international dit de « dernière génération » contre un patrimoine foncier dans un deal de gré-à-gré entre ces deux hommes que des affaires de tous genres unissaient fortement durant toute une décennie. La question est celle-là.
Mohamed Chighali
Journaliste indépendant.