Le 28 novembre, notre indépendance nationale sera célébrée et, comme chaque année depuis 1990, dans une profonde tristesse pour beaucoup de nos concitoyens de couleur noire. Des larmes de sang couleront des yeux de veuves et d’enfants orphelins qui ont perdus soit un père, soit un frère ou soit un parent très proche.
Le 28 novembre 2022, la Mauritanie célèbrera son indépendance à l’âge de 62 ans. Elle célèbrera cette indépendance le visage « ridé » par la gabegie à variantes multiples, par des détournements de deniers publics de toutes sortes, par une grande délinquance économique et financière, par le détournement et le pillage des ressources, par une injustice invariable taillée sur mesures, par le tâtonnement pour atteindre les objectifs fixés, mais surtout, par une injustice « fermentée » à l’égard de la composante négro-mauritanienne du pays dont certains, forcés à l’exil souffrent du mal du terroir et d’autres, à l’intérieur du pays ne sont que de véritables apatrides, sans papiers vivants sous le seuil le plus bas de l’échelle de la pauvreté.
Ce 28 novembre, donc, et malheureusement comme tous ceux qui l’ont précédés depuis la nuit du « massacre d’Inal » (le 28 novembre 1990), sera célébré dans la honte, dans le souvenir de l’horreur, dans un climat de suspicion, de rejet de certains mauritaniens par d’autres, parce que simplement, dans le froid de ce mois de novembre 1990, il y’a 32 ans maintenant jour pour jour, des « négros-mauritaniens » innocents et sans défense ont été massacrés par des « Blanco-mauritaniens » ou des « harnos-mauritaniens » sans aucune forme de procès.
J’ai honte pour mon pays. J’ai honte pour mon pays, dont le « Système » celui-là même qui a toujours, et depuis les premiers dérapages de 1966 (le manifeste des 19), n’a cessé de trainer le pays dans la boue de l’horreur, de l’injustice et du mépris à l’égard de nos confrères négros-mauritaniens.
Depuis 1966, le vase ne cesse de déborder, Il devient même un « jet de sang » qui éclabousse tous les mauritaniens qu’ils soient blancs ou noirs ou « noirs des blancs ». C’est malheureux, c’est triste mais c’est comme ça.
J’ai honte pour mon pays parce que, INAL est une fracture morale que personne ne pourra jamais oublier. Inal, c’est le mal dans toute sa profondeur abjecte. Dans toute sa méchanceté et dans sa forme de lâcheté la plus inimaginable.
Ce ne sont pas des mots qui pourront faire oublier à des veuves, ou à des orphelins ce qui s’est passé dans l’indifférence totale de beaucoup d’entre nous. Et ce n’est pas le prolongement dans le temps de ce problème qui fera oublier aux veuves et ayants droits les criminels qui ont obéis à des ordres pour commettre ce génocide et ce crime contre l’humanité. Ce n’est pas le classement de ce dossier dans le temps et la durée sans suite qui fera oublier aux veuves et ayants droits tous ceux qui ont inscrits volontairement notre pays musulman ou sensé l’être, sur la liste des pays qui ont fait couler le sang sous le pieds d’innocents.
« Réconciliation nationale », « droit de justice », « règlement d’un préjudice moral », « justice transactionnelle », « vérité et réconciliation». Ces mots et ces phrases qui cherchent à donner de la couleur aux revendications de certaines victimes et de certains activistes politiques n’apporteront rien au règlement définitif de ce qui peut être considéré comme un génocide moral sans précédent qui a divisé et qui divise encore profondément les mauritaniens.
La marche militaire, le défilé au son de la fanfare, l’exhibition de la force de frappe de notre armée nationale, ce spectacle aura toujours un goût de « dégout » tant que les mauritaniens ne se sont pas réconciliés avec leur passé, un passé que certains ont écrits dans les annales de l’histoire de notre pays avec une encre de sang indélébile .
Trop, c’était trop en novembre 1990. Trop c’est toujours trop encore aujourd’hui. Mais trop ne doit pas être trop encore trop longtemps.
Le « système », manipulé par des forces centrifuges extrémistes baasistes et nasséristes est débiteur de beaucoup d’injustice à l’égard de la communauté négro-mauritanienne. Ce système doit solder ses comptes par la prise en conscience que les « négro-mauritaniens » sont aussi des mauritaniens à part entière, peut-être même plus que nous autres « émigrés » venus d’ailleurs. Ce système doit, -dans l’intérêt de la cohésion nationale, -arrêter d’infliger tant de souffrances au négros-mauritaniens, souffrances qui durent depuis 1966, (56 ans maintenant).
Ce « Système » doit arrêter de continuer de faire du mal par le mal, parce que ces souffrances ne relève pas seulement de l’injustice, mais surtout relèvent d’une provocation continue à l’égard de la communauté « négro-mauritanienne ». Que cette provocation soit une provocation (volontaire ou involontaire) en tous cas, à long terme, elle risque de faire voler en éclat ce rêve « Vivre Ensemble » et cet héritage que nous a laissé feu Moctar Ould Daddah, le président consensuel de ce pays qui lui aussi malheureusement a été en 1978 victime de ce même Système immoral contre lequel nous devons tous unis et solidaires lutter pour que la Mauritanie se réconcilie avec elle-même.
Mohamed chighali
Journaliste indépendant.