Depuis plusieurs mois, le président de la République appelle au dialogue national. Il est allé jusqu’à nommer un coordinateur pour en assurer la conduite. Un geste que d’aucuns saluent comme un acte de bonne volonté, conforme à l’esprit des grandes démocraties où le dialogue constitue un pilier de la vie politique. Mais en Mauritanie, l’appel au dialogue national fait face à un paradoxe troublant : une opposition morcelée, désunie, et parfois même inaudible.
En apparence, l’opposition démocratique mauritanienne projette une image de sérieux et de cohérence. Elle tient des conférences, publie des communiqués, dénonce les abus et se dresse contre les dérives du pouvoir. Mais derrière ce vernis de respectabilité se cache une réalité moins reluisante : un manque criant d’unité stratégique et de coordination politique. Lorsqu’ils se retrouvent autour d’une même table, les partis d’opposition peinent à se mettre d’accord sur l’essentiel. Trop souvent, les réunions censées tracer une ligne commune s’achèvent sur des désaccords stériles et une dispersion des efforts.
Or, dans le contexte actuel, l’urgence n’est pas seulement de dialoguer avec le pouvoir, mais de dialoguer entre eux. Avant d’entrer dans une salle de négociation avec le gouvernement, les forces de l’opposition doivent régler leurs différends internes, harmoniser leurs discours et définir des objectifs clairs. Ce que réclame aujourd’hui le peuple mauritanien – ce peuple qui n’a cessé de soutenir l’opposition, même dans les moments les plus sombres – c’est une opposition soudée, capable de faire front commun.
Certes, nul ne s’attend à une fusion miracle des partis d’opposition. Les sensibilités idéologiques, les parcours historiques et les intérêts politiques sont trop divergents. Mais une coordination minimale, fondée sur des principes partagés, est non seulement possible, elle est devenue indispensable. Ce que dénoncent de nombreux observateurs, ce n’est pas tant la diversité des opinions, mais l’incapacité chronique des leaders à transcender leurs égos pour construire une véritable alternative.
La fracture principale, selon certains analystes, réside entre ceux qui s’opposent au système dans son ensemble – système enraciné depuis des décennies – et ceux qui contestent simplement le régime actuel. Deux postures, deux niveaux de radicalité, deux agendas. Mais quelle que soit la nature de cette opposition, l’histoire montre que le changement n’est possible que lorsque les forces de contestation savent s’unir autour d’une cause commune.
Le peuple, lui, continue d’attendre. Il regarde, il espère. Et il comprend de plus en plus que les querelles intestines sont l’un des principaux obstacles à l’alternance politique. Le temps est peut-être venu pour les opposants de se rappeler une vérité simple : on ne conquiert pas le pouvoir en ordre dispersé.
MBD: Ha Yésso ko lawol