Washington, 9 juillet 2025. Le décor était solennel, la scène soigneusement orchestrée. Cinq chefs d’État africains, conviés à la Maison Blanche, se retrouvent face au président américain Donald Trump.
Loin de ressembler aux visites présidentielles auxquelles nous sommes habitués, ce moment s’est rapidement transformé en une démonstration de force — une leçon d’humiliation publique dont l’Afrique, une fois de plus, a payé le prix fort.
Au cœur de ce fiasco diplomatique, un épisode glaçant. Mohamed Cheikh El Ghazouani, président de la Mauritanie, tente de s’exprimer. Rien d’excessif dans son propos, juste la volonté d’être entendu et d’exister, quelques instants, au nom de son peuple. Mais ce qui aurait pu être un moment de souveraineté vire rapidement à la débâcle.
Sa voix tremble, ses mots s’emmêlent dans un français hésitant. Ce n’est pas le discours d’un chef d’État qu’on entend, mais celui d’un homme mal préparé, perdu, en quête de crédibilité. La scène est déjà douloureuse, mais elle bascule dans l’humiliation pure lorsque Trump l’interrompt sèchement, sans détour, comme on rabroue un subalterne :
« Juste votre nom et votre pays, ce serait génial. » Pas de courtoisie. Pas même l’ombre d’un respect diplomatique.
Ce n’est pas seulement un président qui a été interrompu, c’est un symbole qui s’est effondré. En acceptant de se taire, Ghazouani n’a pas seulement trahi sa propre voix : il a sacrifié celle de toute une nation. Il a donné raison à ceux qui pensent que l’Afrique ne mérite que des miettes de parole, que ses dirigeants peuvent être rappelés à l’ordre comme des élèves dans une cour de récréation.
Mais Ghazouani n’a pas été seul dans cette tragédie diplomatique. Le président sénégalais, Bassirou Diomaye Faye, pourtant élu sur un élan de panafricanisme et de rupture, a surpris en proposant au président américain d’investir dans des terrains de golf au Sénégal. Une proposition d’une légèreté déconcertante, dans un moment censé incarner la dignité et l’indépendance.
Le président de Guinée-Bissau, Umaro Sissoco Embaló, lui, s’est contenté d’obéir mécaniquement : nom, pays, et rien d’autre.
Quant à son homologue libérien, il était littéralement figé lorsqu’on lui a demandé où il avait été éduqué : silence glacial, regard perdu, gêne absolue.
Seul, peut-être, le président Brice Oligui Nguéma, du Gabon, a tenté de rompre avec cette ambiance de soumission, en insistant sur sa détermination à transformer les matières premières de son pays sur place, appelant à un nouveau partenariat économique. Mais les carottes étaient déjà cuites. Son message, dans ce contexte déséquilibré et dominé par le mépris, est passé presque inaperçu, noyé dans le malaise général.
C’est là tout le drame. Ce à quoi nous avons assisté n’est pas un simple malaise protocolaire : c’est une banqueroute diplomatique à ciel ouvert. Une faillite collective du leadership, une abdication de la parole africaine sur la scène internationale.
Les chefs d’État présents n’ont pas été bousculés : ils se sont volontairement pliés à l’humiliation.
Par leur soumission, leur manque de réaction et leur empressement à plaire, ils ont cautionné le mépris.
Et ils en portent l’entière responsabilité.
AS