Le dialogue politique auquel le pouvoir de Ghazouani a convié les forces vives de la nation et à leurs tête la classe politique, semble s’inscrire dans un informel calendrier républicain, auquel les derniers régimes ont assujetti la scène politique. Tout porte à croire qu’en Mauritanie, ces rencontres bouclent un cycle politique entamé par une présidentielle contestée et culminant à la veille d’une alternance incertaine.
C’est dans cette optique qu’il faut inscrire cette effervescence qui secoue le landerneau socio-politique. L’essentiel étant, pour une grande partie des protagonistes de se positionner pour vivre le cycle suivant.
Outil fondamental de la démocratie, le dialogue est souvent perçu chez nous comme un couteau à double tranchant, eu égard aux expériences précédentes. Boycoter pour ne pas légitimer un éventuel agenda caché du pouvoir ou participer pour enrichir l’expérience démocratique dans notre pays. C’est à ce dilemme que fait face l’opposition.
À mon avis, le problème ne devrait pas se situer à ce niveau. La question fondamentale devrait être les termes de référence de ce dialogue. Rien ne sert à épiloguer sur des sujets déjà débattus de long en large et dont les conclusions n’ont jamais produit le résultat escompté.
Dans sa feuille de route, la coordination du dialogue déclare: « Une majorité des parties prenantes consultées proposent de discuter des thèmes suivants … ».
Même pudiquement évoqués , les « sujets qui fâchent » (l’esclavage, ses pratiques et ses survivances; le passif humanitaire, la promotion de la diversité culturelle ) seront débattus à en croire le document.
Mais, il me semble que cette fois-ci, encore on est en train de faire fausse route. Qu’est ce qui fait que les thèmes proposés n’affectent en grande majorité qu’une seule composante? «That’s the question ».
Il est tout à fait louable de vouloir réparer une injustice, corriger un déséquilibre ou remédier à un problème, mais cela ne suffit pas. Au-delà des « sujets qui fâchent », il faudrait aborder le « sujet tabou». Quel type d’Etat pour la Mauritanie?
Je ne doute pas personnellement de la sincérité de la majorité des protagonistes. On peut se tromper de bonne foi. Le problème survient lorsqu’on s’arroge le droit de penser pour les autres, de canaliser leur spectrum de conception ou de circonscrire leur champs de réflexion. Un avis, même majoritaire n’a de valeur que si le minoritaire peut être entendu, examiné et tenu en compte.
Dans un contexte, c’est vrai un peu différent, Michel Debré disait que: « le conflit est l’essence de la démocratie ». C’est de la confrontation d’idées, la divergence des opinions et la différence d’appréciation que naissent les meilleurs compromis.
Tout observateur sincère et averti est d’avis que la Mauritanie sous cette forme n’est plus viable.
Après 70 ans d’expérience, dans un cadre unitaire « contre vents et marées », ayons le courage et la volonté politique, l’audace et la lucidité d’examiner d’autres options.
Divers modèles ayant fait leurs preuves existent partout dans le monde. De la séparation totale à la décentralisation intégrale.
Après plus d’un demi-siècle de mariage forcé, les pays Baltes, profitant d’une opportunité historique ont divorcé de la Russie pour épouser librement l’Union Européenne.
Le royaume uni est constitué d’entités souveraines, le Zanzibar et le Tanganyika sont autonomes dans une Tanzanie unie. Au États Unis, le Porto Rico n’est ni un État, ni un pays indépendant, mais un territoire associé. Même en France berceau du jacobisme, la Corse a finalement obtenu son « statut spécial ».
Pour notre pays, les FPC optent pour l’autonomie. Non pas l’autonomie du Sud par rapport au Nord ou de l’Ouest vis à vis de l’Est. Mais un cadre unitaire composé de quatre régions autonomes aux contours économiquement et socio-culturellement homogènes.
-Une région à vocation agricole regroupant le Fouta, le Walo Barack et le Guidimakha.
- Une région à vocation agro-sylvo-pastorale regroupant le Brakna, le Traraza et leTagant.
- Une région pastorale englobant les 2 Hodhs et l’Assaba
- Une région minière comprenant l’Inchiri, l’Adrar et le Tiris Zemmour.
Les villes de Nouakchott et de Nouadhibou auront un statut spécial.
Le pouvoir central se délestera de la plus part de ses prérogatives au bénéfice de ces entités régionales. Il ne conservera que les fonctions régaliennes: la monnaie, la défense et les affaires étrangères.
C’est là un axe de réflexion, ses auteurs ne sont ni séparatistes, ni sécessionnistes encore moins indépendantistes. Ils ne sont pas moins mauritaniens que leurs détracteurs. C’est justement par ce qu’ils aiment ce pays qu’ils appellent à sortir des sentiers battus.
Abou Hamidou Sy
FPC Amérique du Nord