Les préparatifs du dialogue national, présentés comme une initiative d’apaisement et de concertation, semblent dès le départ avoir pris une tournure trompeuse. Sous couvert d’inclusivité et de consensus, certains acteurs politiques auraient cherché à manipuler l’opinion publique tout en donnant au président l’illusion d’un processus sincère et participatif.
Les organisateurs du dialogue « ont faussement prétendu que seuls deux partis sur l’ensemble de l’éventail politique boycottaient la rencontre », une affirmation qu’ils qualifient de trompeuse et de contraire à la réalité politique du pays. C’est ce qui ressort d’une déclaration conjointe signée par quatre députés : Mohamed Bouye ould Mohamed Fadel, Khally Diallo, Yahya ould Loud et Mohamed Lemine ould Sidi Mouloud.
Le manque de transparence, l’absence d’un cadre clair et la sélection controversée des participants alimentent le doute quant à la volonté réelle de parvenir à un dialogue national authentique. Les députés ont expliqué que la liste des acteurs concernés est bien plus longue que cela, soulignant que le coordinateur du dialogue a reconnu, dès son premier jour, ne pas connaître la carte politique, ce qui l’empêche de communiquer avec tout le monde.
Pour de nombreux citoyens, il s’agit moins d’un processus de réconciliation que d’une stratégie politique visant à contrôler le récit public et à désamorcer les tensions sociales. Tant que les bases de la confiance et de la sincérité ne seront pas rétablies, ce « dialogue » risque de n’être qu’une mise en scène, loin des aspirations profondes du peuple mauritanien.
Réactions mitigées
Face à ces préparatifs jugés opaques, plusieurs observateurs ont rapidement exprimé leur méfiance. Certains dénoncent un « dialogue de façade » piloté par le pouvoir exécutif, sans véritable consultation des forces politiques représentatives. Les quatre députés ont souligné que tout véritable dialogue doit s’attaquer aux racines de la corruption et mettre un terme à l’hémorragie des fonds publics, et non se transformer en un espace d’échanges de plaisanteries ou de distribution de biens politiques.
D’autres partis, parmi l’AJDMR, affirment avoir été écartés délibérément des discussions préliminaires, évoquant un processus sans calendrier clair ni garanties de transparence.
Les députés ont exprimé leur rejet catégorique de ce qu’ils considèrent comme « une tentative de dissimulation de la corruption, visant à détourner l’attention du public du scandale majeur révélé par les rapports de la Cour des comptes, à travers des discussions formelles ou des manœuvres politiques superficielles ».
Ils ont ajouté que « les rapports accablants de la Cour ne peuvent être ni ignorés ni passés sous silence, car le peuple mauritanien reste déterminé à poursuivre la pression sur les corrompus afin qu’ils rendent des comptes et restituent les fonds détournés ».
Malgré ces réserves, certains acteurs appellent à ne pas abandonner l’idée d’un dialogue national, mais à en repenser profondément les méthodes et les objectifs afin d’en faire un véritable espace de concertation et non un simple instrument politique.
Pour nombre de citoyens, la réussite d’un véritable dialogue passe d’abord par la reconnaissance des fractures sociales, la justice dans la répartition des ressources et la lutte contre l’impunité. C’est à cette condition seulement que la Mauritanie pourra transformer les discours d’unité en un projet collectif durable, au service de tous ses citoyens.